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Légumes verts et anticoagulants


Article Dr Thierry Gibault, Endocrinologue Nutritionniste Attaché des hôpitaux. (Source "Equation Nutrition", publication APRIFEL).



 

Légumes verts et anticoagulants des interdits injustifiés ?

Les aliments riches en vitamine K sont susceptibles d'interagir avec les anticoagulants oraux, comme la warfarine, et pourraient diminuer leur efficacité. Cette éventualité, plus théorique que réelle, est souvent à l'origine de restrictions abusives en légumes verts, alors que certains aliments, comme des huiles ou des plats préparés, peuvent eux aussi contribuer à augmenter les apports alimentaires en vitamine K.

Des interactions possibles

La vitamine K est un cofacteur essentiel des protéines de la coagulation : les Facteurs II, VII, IX et X et les Protéines C et S. La warfarine (Coumadine®) inhibe la synthèse des formes actives des facteurs de coagulation, par compétition avec la vitamine K. D'où son action anticoagulante, utilisée depuis longtemps dans le traitement de la maladie thrombo-embolique.

La phylloquinone est la principale forme alimentaire de vitamine K. Si 1 à 10 mg par jour de vitamine K sont nécessaires pour antagoniser l'effet de la warfarine, les quantités moyennes de phylloquinone consommées dans une alimentation courante sont largement inférieures (60 à 200 mcg par jour) et n'entraînent aucun risque d'interaction avec les anti-vitamines K.

Mais ces doses sont parfois dépassées : ainsi une étude, réalisée en 1995 chez des femmes ménopausées, a pu mettre en évidence chez de grandes consommatrices de légumes verts, des apports quotidiens en phylloquinone supérieurs à 2700 mcg. Il est donc probable que de tels apports en vitamine K peuvent interférer avec l'action anticoagulante de la warfarine.

Les légumes verts et les huiles

Les légumes verts à feuilles, comme les épinards et les choux, sont les premières sources alimentaires de phylloquinone, suivis par les salades (surtout celles à feuilles foncées), et les brocolis.

En règle générale, la teneur en phylloquinone est fortement corrélée au contenu en chlorophylle : plus les plantes sont vertes, plus elles sont riches en vitamine K. Une richesse qui varie selon l'importance des pluies, du degré d'ensoleillement et les conditions de culture. En revanche, les procédés de conservation ou de cuisson n'altèrent en rien le contenu en phylloquinone des végétaux.

Autres sources alimentaires de vitamine K : les graines de soja et de coton, le colza et l'olive, dont on fait des huiles qui peuvent entrer dans la composition des sauces, des mayonnaises, des margarines ou des pâtisseries.

A l'inverse, les huiles d'arachide, de maïs, de tournesol ou de sésame en contiennent peu.

La nature des huiles utilisées dans les préparations industrielles étant rarement spécifiée, il semble préférable de les considérer toutes comme des sources potentielles de phylloquinone.

Cette vitamine est par ailleurs très sensible à la lumière et en 48 heures d'exposition au jour, 50 à 95% de la phylloquinone présente dans une huile sont détruits.

Le contenu en phylloquinone des autres aliments est très faible, inférieur à 10 mg pour 100 grammes. Tous les légumes racines (pomme de terre et oignons), les produits animaux, le foie et les laitages en sont très pauvres (à moins d'être cuisinés avec une huile qui en est riche).

Les risques liés à une consommation non-régulière de végétaux.

Doit on réellement craindre en pratique des interactions alimentaires avec les anti-vitamine K ?

Il faut distinguer trois situations.

Tout d'abord, les sujets traditionnellement grands consommateurs de légumes verts, dont la richesse en vitamine K peut créer une certaine résistance à la warfarine. Seule conséquence : la nécessité de doses plus élevées d'anticoagulant.

Les problèmes viennent surtout des personnes qui ont une consommation variable en légumes feuilles : augmenter temporairement son apport alimentaire en phylloquinone peut donner lieu à un sous dosage en anticoagulant, le réduire expose au surdosage.

Ces situations sont en réalité très théoriques et ont été peu rapportés dans la littérature.

Certaines études ont pu montrer des interactions vitamine K alimentaire et warfarine avec l'utilisation de certains produits de nutrition entérale et parentérale, ayant des teneurs en vitamine K excessives.

En ce qui concerne de véritables interactions alimentaires, les données de la littérature sont plus contrastées.

Dans le cadre de certains régimes amaigrissants, une très forte consommation de légumes verts a pu perturber les paramètres de coagulation chez des patients traités par anticoagulants oraux. Seuls certains légumes verts riches en phylloquinone, comme les choux de Bruxelles, ont été mis en cause et surtout dans le cas de consommation prolongée. En revanche, consommer de temps en temps ce type de légumes n'a aucun d'effet notable sur le taux de prothrombine.

On a évoqué un effet saisonnier de la consommation de légumes verts sur l'équilibre de coagulation chez des patients, mais les données sont peu précises.

En réalité, la teneur en vitamine K des tables de composition alimentaire est absente ou pas assez précise pour pouvoir tirer des conclusions fiables quant à un éventuel effet dose dépendant...

Des conséquences fâcheuses sur l'os

On évoque trop souvent la responsabilité d'un seul aliment pour tenter d'expliquer le déséquilibre d'un traitement anticoagulant, alors que c'est l'ensemble de l'alimentation qu'il convient d'analyser.

En toute logique, ce qui semble important c'est de privilégier une consommation régulière de végétaux verts pour éviter toute rupture d'équilibre liée à de brusques variations d'apport alimentaire en phylloquinone.

En outre, réduire excessivement ses apports en vitamine K, sous prétexte qu'on suit un traitement anticoagulant, peut avoir à long terme des conséquences fâcheuses sur l'ossification (certaines protéines de l'ossification sont vitamine K-dépendantes).

Mais surtout, diminuer de façon drastique sa consommation de légumes verts peut entraîner des carences en micronutriments protecteurs, comme les caroténoïdes.

Il semble donc prudent de favoriser un apport constant et régulier en vitamine K, qui, selon les experts, se situerait aux alentours de 80 mcg/j.

Quand on suspecte une interaction alimentaire à l'origine du déséquilibre d'un traitement anticoagulant, il faut d'abord rechercher une consommation irrégulière en légumes verts. Si ce n'est pas le cas, on peut s'aider d'un semainier pour tenter d'identifier l'origine des fluctuations des apports en vitamine K, en n'oubliant pas que certaines huiles sont, elles aussi, particulièrement riches.

Référence(s) bibliographique(s)
Vitamin K : a practical guide to the dietary management of patients on warfarin / Booth S.L. et al, Nutrition reviews, vol 57, N°9, sep 99, 288-296.




Antagoniser : « aller contre »

La nutrition entérale consiste en l'apport de nutriments dans le tube digestif par l'intermédiaire d'une sonde, de façon à couvrir les besoins nutritionnels quotidiens ou à lutter contre une dénutrition. Cette nutrition est aussi appelée "gavage" dans le langage courant. (Source unité de nutrition. CHU Limoges)

La nutrition parentérale consiste en l'administration de nutriments énergétiques ou dans un but de synthèse par toute voie autre que digestive, le plus souvent par voie intraveineuse (Source unité de nutrition. CHU Limoges)

Les caroténoïdes ont une action antioxydante.

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Page mise à jour le 27/04/08